VEGETARISME
&
SPIRITUALITE

 

 

L'une des principales causes des malheurs de l'homme est son alimentation car il se nourrit d'autres êtres souffrants. Elle lui empêche de se détacher de son corps (à cause du goût) et de renoncer au sentiment de supériorité, cause éternelle de tous les conflits. Et comme une telle pratique est injustifiable, beaucoup de ceux qui mangent les animaux montrent de la mauvaise fois pour se justifier. Celui qui ne mange plus de viande pour des raisons sentimentales ou spirituelles est déjà, par la noble voie de la compassion, sur le chemin de l'illumination.

Il y aura toujours mille raisons pour manger de la viande ou pour s'abandonner à toute autre dépendance. Se battre contre ces raisons est impossible : les mauvaises herbes repoussent aussitôt qu'on les arrache. Toutefois, elles sont toutes aussi paradoxales qu'irrecevables.

En particulier, le mythe de la supériorité humaine repose sur le paradoxe que voici : si nous sommes supérieurs en conscience à l'animal, nous devons donc être plus justes, plus sensés, plus altruistes. Pourtant, nous disons : «Nous mangeons les animaux parce que nous sommes supérieurs en conscience». Si donc on juge que l'homme est supérieur à l'animal en conscience, il faut expliquer en quoi cette différence précise justifie de se nourrir de l'animal, car il semble que manger l'animal ne soit pas plus conscient, mais au contraire plus animal, plus inconscient, et plus cruel. C'est un peu comme si l'on prétendait : «l'homme blanc est supérieur en justice à l'homme noir, donc il a le droit de se montrer injuste envers l'homme noir». C'est là le même type d'argument que celui qui autorise à manger des animaux.

Les musulmans prétendent que les animaux ont été créés pour être mangés, bien qu'ils souffrent et aient une relative conscience. Toute chose a selon eux une utilité. Mais l'utilité des choses est-elle bien celle qu'on leur trouve ? Quelle serait l'utilité de ce qui est bâti, établi, inerte, structuré, monolithique ? Peut-être d'offrir de s'en libérer. Pour cela il faut démolir le moule inerte, enfreindre la bêtise, casser le mur. Celui qui éprouve de la compassion pour les animaux alors que son milieu l'en empêchait a priori a d'autant plus de mérite.

Égalité hommes-animaux
L'homme est d'abord un animal et bien qu'il puisse atteindre l'éveil, c'est là un fait très inhabituel. D'ordinaire, il se préoccuppe davantage pour le ménage, la sexualité, la famille, l'importance sociale, choses que les animaux n'ont pas à apprendre des hommes.

Au sujet de l'égalité entre hommes et animaux, Peter Singer 1 remarquait que tout individu ne peut être égal à un autre qu'en ce qui est comparable. Ainsi, par exemple, il est impossible d'accorder aux hommes le droit d'avorter. Et pareillement, il est impossible d'accorder aux animaux le droit de vote, car aucun animal n'ira voter, sinon l'homme. Toutefois, l'animal ressentant la douleur autant que l'homme, il n'est pas absurde de vouloir les rendre égaux en droit de ne pas subir la douleur.

Quelques-uns s'excusent de leur alimentation en prétendant : «Je ne tue pas moi-même l'animal, il vient tout seul dans mon assiette donc je ne suis pas criminel». Voici une vue bien étroite de nos responsabilités, car nous sommes non seulement responsables de nos actes mais encore des causes et conséquences, nécessairement impliquées. Le «steak» au milieu de l'assiette implique une machinerie infernale d'élevage intensif, de tuerie à la chaîne, de mépris et de violence envers les animaux. En tant que clients, nous en sommes les commanditaires.

Faisant allusion aux pharisiens qui surveillaient avec trop d'attention ce qui était mangé, Jésus dit : «Ce n'est pas ce qui entre dans la bouche qui rend l'homme impur, mais ce qui en sort» (Matthieu 15.11 et Marc 7.15). En effet, selon la loi juive, il fallait qu'un animal, pour être mangé, soit mort d'une certaine façon et non d'une autre, qu'il ait été vidé de tout son sang, qu'il n'appartienne pas à telle ou telle espèce, que rien ne vienne salir la nourriture, etc...
Mais, est-ce que manger de la viande n'est pas précisément faire attention à ce que l'on mange ? Quelle complication ! Car pour que la viande soit produite, il faut employer la violence, élever, abattre, découper et réfrigérer. Pour finir, la viande est dix fois plus cher que les végétaux. En conséquence, Jésus ne nous autorise pas à faire des festins, mais il répondrait probablement à ceux qui voudraient manger de la viande : «Pourquoi t'obstine-tu tant à préparer ton alimentation, à aller exprès égorger un animal, à payer exprès le prix fort, alors que j'ai dit de ne pas la surveiller ?» Si nous considérions que tous les aliments sont les mêmes, nous prendrions logiquement les moins chers, les plus simples et les moins cruels.

Par ailleurs, comment manger de la viande sans égoïsme et sans injustice ? Comment peut-on croire que nous humain sommes faits pour manger, et l'autre, animal, est fait pour être mangé ? Comment peut-on penser qu'il est juste qu'il endure pour nous des souffrances probablement bien supérieures à notre plaisir cullinaire ? Dans l'esprit d'un sage, il est impensable de faire souffrir autrui pour soi.

Certains prétendent que l'animal ne souffre pas. Ce n'est pas juste. D'abord, parce que nous pouvons grâce à la ressemblance qui existe entre et nous et les animaux, les mammifères tout au moins, être sûrs qu'ils souffrent. Non seulement ils éprouvent des sentiments, mais ils sont constitués sur le plan nerveux exactement de la même façon. Ils n'ont pas de nerf, disait Voltaire, qui les empêche de ressentir la douleur. Ensuite, il est impensable que l'on reconnaisse la souffrance d'un embryon de trois mois avant celle d'une vache ou d'un cochon.

Conscience et souffrance
La souffrance n'est pas une affaire de conscience, mais d'intérêts liés à un être individuel. Si l'on juge que l'univers est conscient parce qu'une présence en chaque objet permet qu'ils soient chacun réels, frapper une pierre n'est pourtant pas une agression envers cet univers, car cela n'en menace pas les intérêts.
Il convient donc de se poser la question concernant chaque chose : a-t-elle une conscience individuelle ou sa conscience appartient-elle à l'univers ? Et, par conséquent, pourquoi l'individu existe-t-il ?
Si l'individualité existe et est le propre des animaux, on peut supposer qu'elle existe parce qu'elle avantage la survie des espèces. De même que toutes les espèces n'ont pas un cerveau ou des ailes, toutes n'ont pas l'individualité. Or, l'individualité est d'une part une solution anti-gaspillage et, d'autre part, une qualité nécessaire à la compétition : si un individu de l'espèce se protège par ses propres moyens, il sera plus résistant. Et pour les groupes de peu d'individus, l'individualité est donc une qualité indispensable. Imaginons que dans un groupe de dix animaux, aucun n'ait l'individualité, ce groupe aurait très tôt disparu et l'espèce aussi. Au contraire, s'ils ont tous l'individualité, le groupe disparaît moins vite et l'espèce aussi.
En revanche, s'il existe une grande abondance d'individus, au point que, même si un grand nombre meurent, l'espèce n'est pas menacée, l'individualité n'est pas utile. Il y a alors beaucoup de gaspillage, mais ce gaspillage n'est pas dangereux pour l'espèce. La logique militaire ressemble beaucoup à cela. Quand une armée envoie un commando de dix hommes, chaque vie compte et le rôle de chacun est optimisé. En revanche, quand une armée est très nombreuse, elle se moque de gaspiller ou de ne pas gaspiller ses soldats. Les arbres fabriquent des millions de graines chacun, ils se moquent de les gaspiller ou de ne pas les gaspiller.
D'ailleurs, il faut remarquer que, dès que la partie d'un ensemble est vitale pour l'ensemble – autrement dit : si elle meurt, l'ensemble meurt –, elle reçoit automatiquement une individualité. En tant qu'ensemble nommé hommes, nous n'avons pas de pouvoir sur le cœur, car il vaut mieux pour notre survie que le cœur ait sa propre individualité, qu'il s'économise. En revanche, la perte d'une main n'étant pas fatale, il n'est pas utile qu'elle ait sa propre individualité.
En outre, la souffrance des plantes serait inutile si elle existait. Quand la souffrance concerne un animal ou homme, il a alors le choix de s'enfuir, de crier ou de se défendre. Une plante ne peut pas réagir, alors comment pourrait-elle souffrir ? Pourquoi la nature lui aurait-elle procuré la souffrance sans qu'il y ait de raison à cela ?

Pour que chaque chose soit réelle, il y faut certes une conscience. Mais peu importe, par la suite, le degré de cette conscience. Elle peut être nulle. Ainsi la souffrance, pour être réelle, n'a pas besoin d'être très consciente. L'un des arguments à l'encontre de la souffrance des animaux est qu'il sont apparemment moins conscient que l'homme lequel peut être conscient de lui-même. Mis à part le fait qu'on ne sait rien de la conscience des animaux vis-à-vis d'eux-mêmes, on peut remarquer que l'homme lui-même n'est pas conscient de lui-même à tout moment. Et rien n'indique qu'il le soit au moment de la souffrance. Si l'on juge que la décision et la liberté à l'égard des dépendances permettent d'atteindre un degré de conscience plus élevé, il est même probable que ce degré soit quasiment nul au moment de la souffrance. Et même s'il ne l'était pas, cela ne rendrait pas la souffrance moins horrible chez les animaux. En fait, lorsque l'homme éprouve du plaisir ou de la douleur, c'est moins la douleur ou le plaisir qui est conscient de lui-même, que l'homme qui est conscient de lui-même. En outre, l'homme qui est conscient de lui-même en tant qu'homme est bien inférieur à celui qui est conscient de lui-même en tant qu'univers. Et ce dernier, puisqu'il est le tout, considère la souffrance d'un animal comme sa souffrance.

Discrimination «speciste»
Il n'est pas déplacé de parler de discrimination «speciste» concernant les animaux, équivalente à la discrimination raciste. Puisque nous interdisons le meurtre d'humain, même de fœtus, de malades mentaux et de criminels, la seule nuance qui n'interdit pas le meurtre des animaux est l'apparence. Ils ont quatre pattes, nous en avons deux. Ils ont le museau allongé, le nôtre est plat. Bref, c'est le même problème que le racisme ou l'égoïsme.

Toutefois, Il est vrai que certains prétendent manger de la viande tout en «respectant» les animaux. Mais de quelle forme de respect s'agit-il ? Est-ce le respect pour le morceau de «tissu organique» devant leur assiette ou le respect pour un animal dont ils ont empêché la vie ? Soyons cohérents en ne tolérant plus la violence, qu'elle soit visible ou invisible. Ne chérissons pas les animaux en même temps que nous les mangeons. Ce serait n'être choqué par la violence que visuellement – comme lorsqu'elle est diffusée à la télévision –, et non moralement.

Petit conte d'extra-terrestres
Imaginez qu'un jour, sur Terre, alors que les êtres humains vivaient bien tranquillement, arrivent une colonie d'extra-terrestres. Ces extra-terrestres seraient environ dix fois plus intelligents que l'homme. Fiers de cette intelligence, et manquant cruellement de nourriture chez eux, ils se mettraient donc à manger les humains, ce qu'ils ne considéreraient ni comme injuste ni comme égoïste. Les êtres humains, prisonniers de cages minuscules, auraient, diraient-ils, une condition honorable, qui n'est pas cruelle, puisque selon eux : «Ils sont élevés pour ça». Ils clameraient haut et fort que voici une bête inintelligente dont la chair est très bonne et qu'il doit désormais être possible de trouver de la chair humaine dans tous les supermarchés de la galaxie, car il en va du moral des soldats.
Mais nous, conscients, et même alors que nous serions si faiblement intelligents par rapport à eux, leur demanderions : «Pourquoi, si l'intelligence est uniquement votre motif, n'infligez-vous pas le même traitement à vos attardés ou vos enfants». Ils diraient: «Parce que nos attardés n'ont pas eu de chance», et alors nous répondrions : «Nous non plus !», mais ils rétorqueraient que leurs attardés «n'ont pas eu de chance parce qu'ils auraient pu être normalement intelligents». En effet, ils ne verraient pas que naître humain, par exemple, c'est un manque de chance au sens où la naissance est une gigantesque loterie. Quant au sujet de leurs enfants, ils diraient : «Nos enfants deviendront un jour très intelligents, alors que ce ne sera jamais votre cas. Ce sont des personnes en devenir.» Mais qu'est-ce que veut dire «personne en devenir» ? Car tout le monde n'est pas sujet au même devenir : un adulte moins intelligent qu'un autre n'est sujet à aucun devenir, et les vieillards, par exemple, sont sujets à un devenir probablement pire en matière d'intelligence. Ils ne les maltraiteraient pas pour autant.
Mais nous leur expliquerions ensuite que nous souffrons ! Que nous avons la douleur ! Et ils ricaneraient : «Comment pourriez-vous souffrir si vous n'êtes pas capable de calculer de tête 175412x1384712 ?» Et en effet, comment pourrions-nous leur prouver quoi que ce soit ? Leur langage, contenant 1 000 000 000 de mots environ, s'échelonnant sur tous les aigus et tous les graves, avec mélodie, rythme et articulation, serait bien trop complexe pour nous, et nous serions incapables de rivaliser avec leurs longues tirades sur l'infériorité des humains, tant leurs discours seraient beaux et biens construits, et de surcroît incompréhensibles pour nous.
Mais au dernier moment, avec les progrès de la génétique, des scientifiques en apparence moins inintelligents que la moyenne inventeraient un gène capable de décupler l'intelligence humaine. Les nouveaux humains diraient donc aux extra-terrestres : «Maintenant, pourquoi nous mangez-vous ?». Certains diraient : «Rien ne prouve que, même avec l'intelligence, vous ayez la souffrance». Ils s'apercevraient avec étonnement que nous avons la parole et que nous avons la science, puisque nous avons dépassé l'âge de la matière et somme capables de produire des soucoupes spatiales – le reste n'était pour eux que du «bricolage». Mais tout en s'apercevant de cela, ils continueraient de remettre en cause notre égalité. Ils diraient : «Voyez, les êtres humains sont constitué de carbone, or il est bien connu que seuls les robots souffrent» et «Regardez, l'être humain ne reconnaît pas ses enfants, car le matin il les perd et met sa journée à les chercher et ne les retrouve que le soir». Ou encore, ils diraient «Regardez, ils n'ont aucun attachement à leur parents puisqu'ils les abandonnent à un certain âge». Ils dénonceraient en effet comme ET-morphisme toute idée de conscience chez l'homme, mais en ce qui concerne les mœurs de l'homme, ils les jugeraient immorales en comparaison avec leur propre morale, non selon la nôtre. Ne serait-ce pas là, au moment ou cela les arrange, un ET-morphisme ? Ils considéreraient donc comme cruauté ce qui est cruel selon leurs mœurs et non les nôtres. Et nous verrions pareillement chez eux des choses qui nous semblent très cruelles, sans comprendre qu'eux ne le voient pas ainsi, à commencer par leur façon de nous élever et de nous manger.
Et ceci durerait infiniment car nous n'aurions aucun moyen de nous défendre, jusqu'à ce qu'une autre civilisation galactique arrive et mange ceux qui mangent les humains... Mais, tout cela existe déjà, c'est ce que nous faisons subir aux animaux.

La difficile remise en cause
Demeurer à l'écart des dépendances est relativement facile quand celles-ci ne nous ont pas été inoculées dès notre plus jeune âge. Un non-fumeur n'a pas de mal à ne pas fumer. Un non-raciste n'a pas de mal à respecter les noirs (entre autres). Or, un carnivore l'est depuis longtemps, souvent depuis la naissance. Cette attitude l'incorpore presque et nous n'avons pas de rempart contre nous-mêmes. Il est difficile de briser une éducation de préjugés et l'alimentation en fait partie. Si désireux que nous soyons d'aller au paradis, il y a certaines habitudes confortables qu'il est douloureux mais obligatoire d'abandonner. Déguster un repas n'a aucun intérêt spirituellement et, de plus, cela est si souvent contraire à la santé. C'est un vice que même les religieux connaissent, faute d'autres plaisirs. Est-ce une drogue ?
Lorsque je suis devenu végétarien, je ne devais pas vivre plus de trente ans, selon quelques dires. Idem lorsque, un an plus tard, je suis devenu végétalien. Alors que personne n'avait fait d'étude de diététique, un nombre considérable d'individus m'avaient lancé leurs pronostics pseudo-scientifiques et autres croyances. Mon choix semblait tellement les déranger qu'il devait remettre en cause les fondements mêmes de leur éducation. À travers leurs mots, leur éducation se défendait. Chaque chose qui perdure dans le temps a ses gènes de survie. Les sociétés, les religions, tout. Même un caillou a des gènes de survie : il a la solidité. Notre éducation aussi a en elle-même ses propres gènes : se faire inculquer, s'auto-considérer comme la meilleure, voir d'un mauvais œil tout écart de cette éducation, concourir au profit de nos plaisirs et de nos instincts faciles.
«Il est dangereux, voire impossible, d'être végétarien, sinon végétalien.» Voilà un préjugé planétaire. Cela n'est peut être pas faux mais, a priori, cela a autant de chances d'être faux que d'être vrai. Ce préjugé est grave puisqu'il nous empêche d'évoluer moralement et spirituellement et qu'il est relayé par des classes relativement crédibles de la population – dont une partie des médecins.
Toutefois, si vous demandez à un médecin omnivore quelle est la véritable alimentation de l'homme, carnée ou végétarienne, c'est comme si vous demandiez à un chrétien quelle est la vraie religion, chrétienne ou juive. Il vous répondra : «Oui, bien sûr, on peut être juif, mais la véritable religion c'est quand même la religion chrétienne». Et encore, cela dépend totalement de son degré de tolérance. Il en va de même pour le végétarien qu'on questionne sur la viande, et l'omnivore que l'on questionne sur le végétarisme. Comment alors pourrons-nous reconnaître qui, du médecin omnivore ou du médecin végétarien, a raison ? Peut-être de la même façon que l'on détermine celui qui a raison lorsque l'un se remet en cause et l'autre non. Il est évident que le premier est sincère, quant à l'autre, on ne sait pas. Or, ceux qui se remettent en question sont ceux qui changent. Et, pour la plupart, ils ne deviennent pas omnivores mais végétariens. Ce sont donc les végétariens qui font preuve de remise en question et d'honnêteté. L'omnivore répondra souvent en vue de masquer sa culpabilité.
De fait, la plus mauvaise justification de la viande est la santé. On entend souvent parler des bienfaits de telle ou telle plante, de tel ou tel fruit, mais jamais de telle partie de l'animal, et ce serait même plutôt l'inverse. On commence peu à peu à faire le rapprochement entre nos maladies de dysfonctionnement (intestin, rein, cœur...) et l'alimentation carnée. Toutefois, le progrès est très lent. Au lieu de dire «la viande est dangereuse», on dit : «l'abus de viande est dangereux». Or, ce sont là deux phrases identiques, car pour toute chose dangereuse, c'est l'abus qui est dangereux. On dit bien que la cigarette est dangereuse. Et pourtant, une personne qui fumerait une cigarette par semaine ne risquerait rien. Pour la cigarette aussi nous pouvons dire qu'elle est dangereuse au-delà d'un certain seuil. Il est évident qu'une chose est dangereuse ou ne l'est pas, et que le danger n'est pas dans l'abus, mais il augmente avec l'abus.

Les sentiments de l'animal
L'animal est pourvu de sentiments et d'émotions, comme l'être humain. Qu'est-ce qu'un humain sinon un animal avec un cerveau un peu plus organisé et capable, de ce fait, de mieux ranger ses pensées ? Mais, rien ne garantit qu'il le fasse correctement.
La souffrance n'est guère qu'un stimulus nous avertissant d'un danger afin que nous options pour la meilleure réponse. Notre nature humaine réagit face aux stimuli presque de la même façon que les animaux. Nous désirons ce qui nous plaît et repoussons ce qui nous déplaît. Entre l'instinct et la sensation, il y a seulement une différence de langage. De ces sensations mêmes découle notre amour familial et conjugal. Rien n'empêche l'animal de les éprouver aussi. Quant à la vraie intelligence, elle n'entre pas en équation lorsqu'il s'agit de sentiments. Au moment d'aimer, un calcul est inutile.
Contrairement aux croyances, ce n'est pas lorsque l'animal est tué qu'il souffre le plus. Si un joli pot suffit à une belle plante, une jolie cage ne suffit pas à un animal. Ils ont des jambes, des oreilles et des yeux. Ces organes ont une utilité chez eux comme chez nous. Si nous les enfermons, ils ne marchent plus, n'entendent plus et ne voient plus. Cela ne peut que les faire déprimer. Comme nous, ils ne sont pas faits pour rester statiques. On ne peut pas penser que quiconque pourrait accepter de vivre dans les conditions dans lesquelles vivent les animaux de ferme.

L'élevage des animaux est également un gaspillage écologique, en plus d'une quantité de souffrance exorbitante infligée à l'animal. En effet, chaque kilo de viande produit l'a été avec au minimum 20 fois son poids en végétal (dont 7 à 16 kg de soja ou de maïs) 2, 10 fois en moyenne son équivalent en protéines végétales, 7 fois en moyenne l'espace agricole utile. Ces chiffres varient selon les études. Un proverbe bien connu serait approprié pour décrire la situation : «On prend le grain du pauvre, pour nourrir la vache du riche». De plus, celui qui prétend contre tout argument que les plantes souffrent ne peut plus trouver d'excuse pour manger des animaux. Il a un bon moyen de réduire l'hypothétique souffrance des plantes en les mangeant directement, plutôt qu'en les donnant à manger en quantités décuplées.

Quelques chiffres en plus :
- Environ 100L d'eau sont nécessaires pour produire 1kg de végétal alors qu'environ 2000 à 3000L d'eau sont nécessaires pour produire 1kg de viande (3).
- Aux états-unis, 80% des cultures sont destinées à la nourriture des animaux et 90% du soja mondial est destiné à l'alimentation des animaux (4).

Cela illustre que le végétarisme peut reposer également sur des raisons écologiques ou même paradoxalement sur la défense des végétaux.

Exercer la cruauté
Nous nous justifions parfois en prétendant que le monde est cruel, ce qui nous autorise aussitôt à imiter celui-ci dans des proportions plus importantes. Nous enchérissons dans la cruauté. Il faut croire que, si elle n'existait pas, nous l'inventerions, tant elle dans notre intérêt. Mais, si elle n'est pas notre intérêt, il faut la combattre.
À la différence des animaux se combattant les uns les autres dans l'anarchie totale, l'homme peut fort bien faire pousser des plantes et s'en nourrir, ce qui, d'ailleurs, dans le passé, constituait probablement son alimentation naturelle. Le berceau de l'humanité est en Afrique. Là-bas, il y a des fruits toute l'année. De plus, l'homme est conscient de faire souffrir, ce qui est pire que de tuer sans le savoir ; il n'a donc guère d'excuse ; il n'est pas obligé de tuer.
L'homme sauvage de la préhistoire et l'homme civilisé d'aujourd'hui n'ont en réalité qu'une seule différence qui se situe dans le confort, mais non dans la mentalité. De l'extérieur, l'homme d'aujourd'hui paraît plus raffiné, plus instruit et plus propre, mais ce raffinement et cette instruction ne sont qu'une face. À l'intérieur, il est toujours le même.

L'exercice d'insensibilisation à la douleur d'autrui commence dès l'enfance. Pour l'enfant, il est en général incohérent de manger et d'aimer l'animal, logique naturelle et ineffable. Mais comment un petit enfant tiendrait tête à sa mère ou à la maîtresse, alors qu'il croit qu'elles détiennent la vérité ? S'il objecte, elles peuvent se fâcher comme cela arrive parfois. Il ne sait pas que le steak ou le jambon est un animal si on ne le lui dit pas. La société empêche ainsi les réflexes altruistes qui la déstabiliseraient assurément. Or, c'est à cet âge, où l'on ne peut juger de rien, que nous sommes sans défense et que s'acquièrent les comportements les plus vivaces. Envers un enfant qui n'a que deux ou trois ans, et jusqu'à l'adolescence, il est facile de prétendre qu'il est normal d'élever les animaux pour les manger, comme de lui mettre dans la bouche des paroles de haine raciale. Prétendre le contraire plus tard est en revanche beaucoup plus difficile.

Une éthique
Le végétarisme n'est pas l'apanage des hippies, des allumés, des écologistes proches de la nature. Il est important de ne pas étiqueter le végétarisme car il devrait être le naturel de chacun. C'est une éthique, une justice, qui ne nécessite pas une qualité ou une apparence spéciale pour être respectée, même si l'intelligence et le cœur y incitent. Voici quelques grands hommes végétariens : Pythagore, Socrate, Diogène, Plutarque, Plotin, de Vinci, Gandhi, Einstein, etc 5.
Le végétarisme révèle beaucoup d'aspects d'une personne, parmi lesquels la compassion et la sincérité. Avant d'aimer, on doit être capable de respecter. Gandhi disait : «On mesure l'évolution d'une société à la façon dont celle-ci traite les animaux».

Le végétarisme en religion
Il est paradoxal d'être religieux et de ne pas être végétarien. Le désir de ne pas faire souffrir conditionne toute compassion élaborée. Les végétariens en religion sont encore peu nombreux étant donné les prétentions d'éveil et de sérénité des religieux. Mais, dans le passé, ils l'étaient probablement presque tous.
Les religions végétariennes ou végéphiles sont le bouddhisme, l'hindouisme, le rastafarisme, le jaïnisme et le taoïsme. La plupart sont orientales, mais il y a eu des exceptions en Europe. Les cathares, célèbres pour leur discipline ascétique, ne consommaient aucun produit d'origine animale, exception faite du poisson, exception à leur sagesse. Ils partageaient cette interdiction avec les coptes, qui existent toujours en Égypte et qui sont peut-être plus proches que nous de Jésus, à la fois sur la carte et dans les pratiques. Les cathares montrèrent leur grande robustesse d'âme à plusieurs reprises. Ils mangeaient comme ils résistaient, c'est-à-dire sans violence.
Les anachorètes et les ascètes ont pour but de s'extraire des conditionnements, plaisirs et préoccupations, et ils ne mangent donc ni viande, ni poisson sauf exception, ni matière animale. Saint Antoine, initiateur de l'anachorétisme, vécut pendant cent six ans (250-356) à partir d'une alimentation entièrement végétale (pain et racines principalement). Chez les catholiques, les cisterciens – aujourd'hui en diminution – étaient des moines simples, rejetant le luxe et les repas de viande, ainsi que d'autres matières animales. Toutefois, aujourd'hui les moines sont rarement des ascètes.

Le végétarisme a été soutenu par quelques théologiens, parmi lesquels Martin Luther. Les esséniens – plus connus sous le nom de «judéo-chrétiens» et qui étaient peut-être les premiers chrétiens – suivaient le même régime que les cathares et les coptes, et ils ne pratiquaient pas de sacrifice animal, ce qui les distinguait des juifs orthodoxes. Flavius Josèphe les décrit comme étant doués de grandes qualités, et détenteurs d'une grande sagesse. Il explique qu'ils refusaient de manger de la viande, même sous la torture, et rendaient l'âme avec grâce. Parmi eux, dit-il, les centenaires n'étaient pas rares. Il les décrit comme des individus exceptionnels (5).
Toutes les religions conservent plus ou moins une influence de végétarisme, même restreinte. Dans certaines d'entre elles, c'est une obligation (jaïnisme & rastafarisme). Dans la plupart des religions asiatiques (hindouisme, bouddhisme...), c'est un avantage. Dans cette région, 30% des religieux sont végétariens – estimation personnelle. Les autres religions n'incitent qu'à certaines privations. Chez les musulmans, le porc est prohibé. Les juifs s'interdisent de manger les ruminants à sabot non-fendu – dont le porc, mais pas uniquement –, les rapaces, les fauves et les poissons sans épine dorsale. Les chrétiens pratiquants s'abstiennent le vendredi et pendant le carême.
Mais est-ce que les limites de la consommation de viande ne sont pas un reliquat de végétarisme, remontant à l'époque de Jésus ? Ne s'abstenir de viande que le vendredi est étrange et absurde – pourquoi uniquement le Vendredi ? Les chrétiens prétendent que c'est pour ne pas manger le Christ ce jour là, parce que c'est symboliquement le jour de la résurrection : le vendredi de Pâques. Or, il y a là une projection évidente de l'homme dans l'animal, et les chrétiens devraient prolonger la logique jusqu'à terme. Puisque l'animal est la projection de l'homme, comme l'homme est la projection de «Dieu», il ne faut pas le faire souffrir pas plus que nous n'aimons souffrir. En tout cas, c'est la preuve que notre façon de voir l'animal est ambiguë : il ne souffre soi-disant pas mais il est de même nature que le Christ. Cela est étrange.
En outre, il n'est pas impossible que le judaïsme lui-même ait été végétarien. Peut-être qu'à mesure que le judaïsme vieillissait, les patriarches ont décidé que l'alimentation était superficielle, comme le décident aujourd'hui beaucoup d'individus. Le sixième commandement précise : «Tu ne tueras point» (Deutéronome, 5.17). Il ne précise pas «être humain». Et on pourrait, suivant la logique qui autorise à tuer des animaux, se permettre de tuer lorsqu'il ne s'agit pas d'une personne de son clan, de sa patrie, de sa famille. C'est un commandement que même les guerriers – juifs ou chrétiens – estimaient respecter. Voilà pourquoi les guerres continuent. Voilà pourquoi les massacres d'animaux continuent. Les croyants lisent souvent ce commandement non comme il est écrit, mais comme ils veulent le lire. Puisqu'il y a certaines nécessités qui sont de conquérir du territoire et de cuisiner quelques grillades, il était préférable à tous que personne ne comprît la réelle signification de cet ordre tout simple.

Certains prétendront que dans la religion – juive en particulier –, «Dieu» a demandé des sacrifices. Mais il est douteux que «Dieu» souhaite de pareilles preuves. D'abord, parce que «Dieu» étant complet, il ne peut rien souhaiter. Ensuite parce que, sans être religieux, il est facile de comprendre que les sacrifices sont cruels. Ils remontent peut-être à la religion pré-judaïque, au culte de Baal. Les sacrifices contribuent essentiellement à l'ignorance de la nature de «Dieu» – qui est spirituel – et perpétuent la violence. Ils ne sont pas voulus par «Dieu», comme le précise Isaïe (1.11), Amos 5.22 et Osée 6.6.
Aussi, pour ne pas nous confondre dans la haine et le fanatisme, nous devons suivre notre cœur et notre raison, lesquels nous inclinent à la pitié et nous prient de ne pas nous entêter dans l'égoïsme. Et la violence envers l'animal peut facilement être projetée sur l'homme. Isaïe explique que lors des temps finaux, le loup et le bœuf mangeront tous deux de la paille (11.7). Il n'y aura plus le désir de tuer, pas même pour se nourrir. Ce temps sera évidemment positif, puisqu'il sera le trépied favorisant l'émergence d'une humanité nouvelle, sans guerres et sans égoïsme. Pourquoi n'avons-nous pas mis en œuvre ce changement le plus tôt possible, sachant les bénéfices qu'il accompagnait ? Sommes-nous donc plus désireux du malheur, que du bonheur ?
Enfin, voilà une dernière remarque à l'intention de ceux qui croient en «Dieu» et qui n'ont cependant pas pitié de l'animal. Puisque «Dieu» est bien plus supérieur à nous que nous le sommes aux animaux, comment «Dieu» pourrait-il avoir pitié de nous si nous n'avons aucune pitié pour les animaux ? Celui qui mange de l'animal s'imagine que tout lui est dû, et qu'il n'a pas d'effort à faire pour soulager facilement une immense peine ; «Dieu» peut faire la même chose. Voir la parabole du «débiteur sans pitié», Matthieu 18.23-53.

Végétarisme et nature humaine
Se mettre au végétarisme ne signifie que se priver de quelques aliments sur mille : viande et poisson. Celui qui mange de ces deux aliments, en général, se prive au contraire de bien des sortes de végétaux. Bien sûr, il s'agit également d'ôter les produits d'origine animale de la vie quotidienne : cuir et fourrure, produits cosmétiques, duvets. A fortiori, il suffit de se priver de lait et d'œuf pour être un végétalien parfait. Ce n'est pas très compliqué. La seule contrainte est la société de consommation qui croit qu'il est intelligent de mettre du lait et de l'œuf partout.
Le végétarisme et le végétalisme ne sont pas dangereux malgré les affirmations des médias à ce sujet. En réalité, le végétarisme est bénéfique pour la santé et le végétalisme est sain, en attendant que nous prouvions qu'il est très bénéfique. La santé est une préoccupation futile puisque nous mourrons. Et celui qui accorde de l'attention à sa santé ne fait que se rajouter quelques jours de vie. Il est douteux que cela nous élève spirituellement. Alors, si le monde était construit pour nous faire évoluer spirituellement en nous infligeant une mauvaise santé lorsque nous nous attachons à elle, comment ne serions-nous pas punis en nous y attachant au point de détruire complètement celle des autres ? D'un point de vue providentiel, les maladies de ceux qui mangent de la viande sont à leur égard une leçon logique.
Plusieurs études qui se sont déroulées en Angleterre sur un grand nombre de personnes le prouvent. Les végétariens avaient meilleure santé, enregistraient moins de décès, développaient même beaucoup moins de cancers que les omnivores, dans tous les domaines. L'une, faite par l'Étude Végétarienne d'Oxford, concernait 11000 personnes (dont 6000 végétariens), l'autre, faite par l'EPIC, concernait 20000 (dont 10000 végétariens) 6.
Ainsi, l'homme n'est pas omnivore comme on a longtemps voulu le faire croire. D'ailleurs, personne ne peut comparer sa dentition à celle d'un loup ou d'un tigre. Nos ridicules «canines» ne sont rien à côté de celles de 4cm du panda géant, se nourrissant totalement de bambous. Certains ours d'Asie, capable de broyer une jambe avec leur mâchoire sont cependant végétariens. En outre, le gorille à la mâchoire et à l'allure terrifiantes est un singe strictement végétalien et d'une grande tendresse envers les autres animaux.
Qu'on cesse donc de prétendre que c'est la nature qui pousse à manger de la viande ; rien de plus faux. En effet, il n'y a rien de naturel dans la consommation de viande et de lait. D'abord l'élevage, réclamant des surfaces et des entrepôts, des machines pour retirer le lait, ensuite lorsque l'on tue l'animal avec un couteau en acier ou par une dose d'électricité, puis lorsqu'on le découpe avec des machines ou des couteaux : qu'est-ce que tout cela a de naturel ? Rien car «naturel», si la définition est bonne, signifie «qui n'a subi aucune altération». Mais, dans le cas présent, nous sommes en pleine dénaturation et dans ce que l'on appelle la «culture» par rapport opposition à la «nature». Si nous étions nus et face à un taureau, un oiseau, un sanglier ou un lapin, il y a peu de chances qu'avec nos bras, jambes et dents, nous puissions nous nourrir de l'animal. La nature nous permet certes de cueillir des fruits, des racines, voire des insectes, mais non pas les viandes ni les poissons. Nous ne sommes pas adaptés à la viande, il faut que nous l'adaptions en lui faisant subir de nombreuses modifications.

Les médias.
Lorsqu'une recette financière est menacée, les profiteurs de cette recette se défendent comme ils le peuvent, parfois par des manipulations et des mensonges. Quelqu'un dont l'honneur et le gagne-pain sont menacés se défend doublement. Attendu que la consommation de viande est maléfique, il est normal qu'ils adoptent des tactiques désespérées, voire violentes, auxquelles ils sont habitués.
En France et en Angleterre, il n'est pas rare que des manifestation pro-chasse tournent mal, avec des jets de pierre et des dégradation volontaires. Cela montre que les violences faites aux animaux passent facilement aux humains.
Toutefois, tous les éleveurs et tous les bouchers ne sont pas forcément conscients du problème que constitue cette violence et ils sont sans doute dans le même cas que l'immense majorité de la population : ils croient que la viande est indispensable à la santé, et qu'il n'y a pas de mal à faire souffrir un animal si c'est pour soi-même. Peu de personnes affirment le contraire et ils font figure de fausse note. Le bon ton est de vanter les produits franco-français du terroir et de donner libre cours aux préjugés sur les végétariens et, a fortiori, sur les végétaliens. Il est également de bon ton d'offrir du travail à tout le monde, ce travail fût-il d'égorger des animaux ou de les enfermer dans des cages voire, y compris, de faire des expériences douloureuses et inutiles sur eux.
Quelques scientifiques allant à contre-courant commencent cependant de remettre en question notre vision idyllique du bon plat de viande, ainsi que du bon fromage. En France, les diététiciens sont partagés. Certains – même s'ils sont rares – n'ont pas honte de dire que 250g de viande par jour sont nécessaires. D'autres sont au contraire végétariens ou végétaliens et vantent cette alimentation, mais on les prend pour des ânes. Dans quelques années, peut-être tiendrons-nous un son de cloche différent. La médecine, et en particulier sa branche diététique, est une science très instable, dénonçant ses propres positions tous les dix ans.
Déjà, de l'autre côté de la Manche et de l'Atlantique, de gros progrès ont été accomplis avant nous. L'histoire se répète : les Américains et les Anglais ont une mentalité dix ans en avance sur la nôtre, pour le pire comme pour le meilleur. L'association américaine de diététique a publié en 1999 un rapport vantant les mérites du végétarisme et incitant cependant les végétaliens à la prudence, notamment à propos de l'apport en vitamine B12, qui est rare dans les végétaux. Ce problème reste à relativiser. La vitamine B12 est nécessaire en quantités si faibles qu'un milligramme suffit pour la vie et que l'on peut trouver dans les champignons, les levures, ce qui est sale, et éventuellement, sous forme de pilule. En décembre-janvier 2001, une publicité du Comité des médecins pour une médecine responsable («Physicians Committee for Responsible Medicine») dénonçant les méfaits du lait et le lobby des fabricants de produits laitiers a été diffusée aux États-Unis 7.
En outre, la télévision, à force d'évoquer les aspects futiles de l'alimentation végétarienne, nous détourne du vrai problème : l'éthique et le respect. Tantôt, elle prétend que le végétarisme n'a pas de goût ou qu'il oblige à regarder les étiquettes, etc. Ce sont des aspects futiles, évoqués en vue de nous maintenir dans un niveau de futilité rendant plus difficile le renoncement à la viande. La triche était également utilisée : un documentaire diffusé sur M6 (E=M6, 5 décembre 2000) faisait passer pour un végétalien quelqu'un ne mangeant que du riz blanc. Cela passa inaperçu devant de nombreux téléspectateurs. Une végétalienne en bonne santé et bien costaude était cependant filmée dans la même émission, mais ils n'ont pas informé qu'elle l'était depuis trente ans : un élément essentiel était, volontairement ou non, caché au public.
Conscientes qu'elles ont un pouvoir sur les mœurs et une grande suggestivité à l'égard du téléspectateur, les chaînes emploient la ridiculisation pour freiner le végétarisme. Ainsi, l'émission «Envoyé Spécial» sur France 2 (grande écoute) inventait des informations selon les besoins du documentaire. Dans leur émission du 23 novembre 2000, ils qualifièrent les végétaliens anglais de terroristes pour la seule raison que, couverts de cagoules, ils libèrent des animaux de laboratoire. Dans leur esprit, tout homme cagoulé est un terroriste ; ce n'est pas très pertinent. Par ailleurs, ils faisaient des erreurs de traduction. Ainsi, lorsque le président de la «libération animale» expliqua qu'il avait été arrêté pour activité illégale, ils traduisirent par «menaçante». Pour exprimer ce qu'elle voulait que nous croyions, la chaîne filmait toujours les végétaliens dans des conditions agitées, floues, et les vivisecteurs étaient quant à eux filmés au coin d'un feu et dans une ambiance chaleureuse.
En somme, les médias essaient de nous empêcher d'être végétarien ou végétalien et il vaut mieux ne pas se fier au informations manipulées par des intérêts financiers. Mieux vaut lire à ce sujet des livres sérieux, écrits par des philosophes ou des scientifiques. Les livres vantant le végétarisme sont peut-être orientés, mais c'est par la compassion et non pas par l'attrait de l'argent.


Notes :
(1)Voir la Libération Animale, Peter Singer, Grasset 1992. Chapitre 1.
(2)Voir «Time Bomb Livestock Business» p. 22-23
(3)Source: Earth Save Foundation.
Avertissement : selon les méthodes de production les valeurs peuvent varier.
(4) Voir Trois traités sur les animaux, Plutarque, par Elisabeth de Fontenay, édtitions POL, 1992. Marjolaine Jolicoeur, Végétarisme et Non-violence, éditions Commensal.
A Vegetarian Sourcebook, The Nutrition, Ecology, and Ethics of a Natural Foods Diets, Keith Akers , Vegetarian Press ainsi que Famous Vegetarians, & their favorite recipes by Rynn Berry , Pythagorean Publishers.
(5)Voir, Flavius Josèphe, La guerre des juifs, édition des Belles Lettres.
(6)Voir la revue anglaise EVU News, numéro 2, 1996 ou s'adresser à Paul Appleby, Oxford Vegetarians, 57 Sharland Close Grove, Wantage, Oxford OX12 OAF, Tel. +44-1235 769425, E-Mail oxveg@ivu.org
(7)En France, l'Association Végétarienne & Végétalienne d'Informations (AVIS) a publié une brochure tentant de cerner toute la question du Végétarisme : éthique, nutrition. Elle présente une réflexion personnelle, des extraits de livres, et des études scientifiques sur la nutrition. Cette brochure est gratuite et disponible à Canal Sud, AVIS, 40 rue Alfred Duméril, 31
400 Toulouse, France

 

 

 

 

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